American Airlines

American Airlines
Thierry Brun, Editions Kubik, American Airlines

lundi 4 janvier 2016

Enard Boussolle Meilleures Ventes

Pour donner malgré tout un fil d’Ariane à ce pensum pansu (ne vous fiez pas aux 400pp annoncées, si les passages à la ligne avaient été respectés, le livre ferait 3.726pp), l’auteur l’a coulé tel un bloc de béton dans le fleuve tumultueux de ce que mon confrère qualifie de « magnifique histoire d’amour ». Hélas, n’en déplaise à cet incurable romantique qu’est Osman Khaled, ladite romance n’est pas plus vraisemblable que ses protagonistes ne sont crédibles!



Notre musicologue insomniaque, provincial viennois quelque peu falot, passe son temps à courir, au même rythme qu’il cherche ses pantoufles, après l’objet de sa passion. (Enfin moi, je dirais plutôt après le reflet du souvenir de l’ombre de sa passion!)
Cet objet, c’est la très insaisissable Sarah, orientaliste française aux origines juives iraniennes, furieusement exotique et frénétiquement polyglotte (ou l’inverse), quant elle n’est pas passablement hystérique.
Me permettra-t-on de dire que cette Sarah, qui occupe toutes les pensées de notre brave Franz, est une vraie peste? S’il existait un prix de la cuistrerie, elle serait nominée haut la main pour le jabot d’or!



Quelques exemples parmi tant d’autres… Lors d’une expédition au mémorial de Saint-Gothard, que Sarah feint d’avoir décidée au pied levé, Franz s’aperçoit qu’elle l’a en réalité laborieusement préparée:  « [Elle] avait potassé (et pas question d’un coup de Google en ces temps déjà anciens) la vie de Hammer-Purgstall l’orientaliste, à tel point que je la soupçonnais d’avoir lu ses Mémoires, et donc de me mentir quand elle disait savoir très peu d’allemand [la demoiselle maîtrisant déjà parfaitement une multitude de langues, elle peut bien rester modeste sur celles qu’elle ne connaît qu’à moitié] ; elle avait préparé sa visite à Mogersdorf, connaissait tout de cette bataille oubliée [ayant opposé en 1664 les Ottomans aux forces du Saint-Empire] et de ses circonstances. »


Un second exemple pour la route: évoquant Ali Shariati, Gilbert de Morgan, l’abject professeur de thèse de Sarah, se tourne soudain vers celle-ci pour lui demander si Saïd mentionne l’idéologue de la révolution iranienne dans ses travaux. – Euh oui, je crois, dans Culture et impérialisme, hésite Sarah, aussi désarçonnée que si elle avait été piquée par une guêpe, mais je ne me souviens plus en quels termes. » Et Franz de commenter: « Sarah s’était mordu la lèvre avant de répondre; elle détestait être prise en défaut. Dès notre retour, elle allait se précipiter à la bibliothèque – et hurler [sic] si d’aventure les œuvres complètes de Saïd ne s’y trouvaient pas. »


Cela n’a apparemment pas empêché Osman Khaled d’adhérer aux inclinations du narrateur, voire de les partager: à lire sa critique enflammée, on croirait que lui-même en pince pour la petite arrogante.

Thriller. Découvrir le nouveau roman de Thierry Brun. Editions Le Passage. La Ligne de Tir : Révélation. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire