"...Delphine soupira en travaillant des jambes vers mon
côté du lit. Je l’enlaçai, bouleversé par la finesse et la douceur de sa peau,
caressai ses fesses en me disant que tout ça était éminemment stupide. Je refusai
de l’interroger au sujet de son mari. Elle avait préparé son truc, je lui
faisais confiance.
Elle me tourna le dos en se cambrant pour me faciliter les
choses…
À chaque fois, c’était la même chose, je ne pouvais
m’empêcher de me souvenir du temps où Anne peinait à ramper hors du lit, où elle
se sentait trop faible pour nous faire un en-cas digne de ce nom. Jouir nous
épuisait au point que nous ne pouvions faire le moindre mouvement.
Je me cramponnai aux hanches de Delphine à les briser.
Elle manquait de m’échapper, jouissait en donnant des coups de reins dans une
espèce de roulis spasmodique. Elle m’encourageait, me remerciait. Au final,
elle s’effondra sur l'oreiller en grognant.
— Eh bien maintenant, je sais, lâcha-t-elle. Je sais… Je
n’en étais pas absolument sûre. Maintenant, je le sais.
Ses cernes se détendaient. Elle soupira d’aise en s’étirant.
M’ausculta du regard, de la tête au pied.
— Dis donc, t’es en forme.
Je me retournai de mon côté du lit pour m’asseoir au bord.
— Rentre chez toi.
— Je t’en prie. On ne peut rien y faire, tu m’entends ? Je
savais qu’on matcherait.
— Il n’y a pas de On.
C’est arrivé, une fois. Mais, c’est fini.
— Tu aurais pu me renvoyer.
— J’aurais pu.
— T’en avais autant envie que moi. J’ai bien vu comment
tu me matais.
Je la regardai, éberlué. Cette fille allait me causer les
pires ennuis.
Elle se redressa mollement en soupesant ses seins encore durs ;
elle souriait. Puis, elle alluma une cigarette. Je compris confusément que dans
sa tête, elle s’installait, elle allait devenir ma galante, je comblerai ses
prochaines parenthèses adultères. Je vis bien à son sourire qui refusait de
disparaître qu’elle concoctait déjà un scénario qui allait plus ou moins dans
ce sens.
Je l’observai. Et
voilà que la bête se réveillait, à en juger par le violent désir qui me
submergea de nouveau, qui me tordit le ventre. J’étais incorrigible. Incapable
de la plus petite réflexion cohérente face à la nouveauté d’un corps. Je me
jetai sur elle, lui emprisonnai les bras. Elle me toisa sans desserrer les
dents. Il y avait quelque chose dans son regard, comme un défi, une autorité
qu’elle pensait, à juste titre, exercer sur moi. Et, je crus aussi entrevoir
une forme de colère rentrée, mais je n’y pris garde. Puis tout à coup, je
compris que Delphine avait dû me surveiller, ou du moins roder dans les parages.
Attendre le bon moment… Et, j’en restai interdit. Mais non, elle avait
certainement agi sur un coup de tête, après deux trois verres.
Quelque chose en moi avait tout déclenché, en quelques
secondes. C’était du moins ce qu’elle m’expliquait en se versant un café. Elle
ne se décidait pas à rentrer chez elle. Chez eux ! Je venais de faire l’amour à une femme mariée, avec tout ce
que ça comportait comme conséquences possibles. Je tournai autour d’elle. Le
soleil joua avec sa blondeur ébouriffée.
— Faut que t’y ailles, là..."