American Airlines

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Thierry Brun, Editions Kubik, American Airlines

dimanche 14 août 2016

La Violence, le Mort dans le roman policier;


http://www.cinemafantastique.net/Antre-du-Mal-L.html


Bref itinéraire du roman policier 


Les précurseurs

En 1829, Balzac publie Les Chouans, œuvre dont certains aspects préfigurent le roman policier. En effet, Corentin, fils naturel présumé de Fouché, débute dans le métier de la police, c'est aussi un agent secret. On le retrouvera dans Une ténébreuse affaire, puis Splendeurs et misères des courtisanes et Les Petits Bourgeois. En 1841, Edgar Poe écrit les premières nouvelles policières directement inspirées de faits divers (lien avec la réalité). A noter chez ces deux auteurs le lien étroit avec la réalité (d’où la proximité avec un lectorat populaire) mêlé avec la fantaisie propre à la fiction ; le niveau de langue est très soutenu chez l’un et l’autre. 



C’est seulement avec Conan Doyle qu’émerge la première figure de détective vraiment scientifique. À l’inverse de Sherlock Holmes, personnage de pur enquêteur, sans émotions, sans vie de famille, ses contemporains français sont engagés dans le jeu des passions, des idéologies et des morales de leur époque. Ainsi, Gaston Leroux doit sa célébrité à un récit de chambre close où le détective Arsène Lupin, le gentleman cambrioleur héros de Maurice Leblanc, vole au secours des démunis au point de leur abandonner une partie de son butin (1905). Rouletabille de Gaston Leroux conduit ses investigations (1907). Fantômas 1911. 


http://www.lagardedenuit.com/wiki/index.php?title=R%C3%A9bellions_Feunoyr


   Le roman anglais : détection : 


 Il est avant tout anglo-saxon. Et le plus connu des écrivains de ce genre est Agatha CHRISTIE.(1891-1976) : ses héros Hercule Poirot et Miss Marple sont les dignes héritiers de Sherlock Holmes. La mention des titres met en évidence le paradigme de la mort, d’où la mention de l’adjectif « noir ». Ces romans sont élégants, avec une écriture maitrisée, ils décrivent des milieux anglais sophistiqués et font appel à l’intelligence de la lecture. Ils ont un côté « horlogerie » bien réglée qui fascine (ou lasse). 




Les écrivains français : 

 Le grand virage des années 1930. Bon nombre d’écrivains épousent à cette époque sans réserve les règles du policier anglais. Collections le Masque et L’Empreinte. Puis de nouveaux auteurs vont se manifester. Pierre VERY (1900-1960) L’Assassinat du père Noël (1934), les disparus de Saint-Agil (1935), Goupi mains rouges (1937). Il veut que ses personnages soient des êtres humains en lutte avec la vérité. Ses romans sont parsemés d’anecdotes de la vie quotidienne, d’anciennes traditions. Cette tendance s’accentue avec les romans paysans. L’Assassin habite au 21 (1939). Son détective se nomme M Wens, c’est un ancien policier qui s’est mis à son compte. Il a créé Aimé Malaise, personnage à la Maigret, un an avant la sortie de Maigret. 

http://www.parislibrairies.fr/livre/9782847423327-les-rapaces-thierry-brun/ 

 Claude AVELINE, célèbre romancier et essayiste, publie pour se divertir en 1932 un très bon roman policier : la double mort de Frédéric Belot. Il cherche, de cette façon à prouver qu’il n’y a pas de genre littéraire mineur. Il en écrira Cinq autres ensuite ans une période de quarante ans. Pierre BOILEAU qui prendra conscience plus tard de la nécessité d’un renouvellement et s’associera à NARCEJAC.


Georges SIMENON avec son Maigret qui arpente le monde pour rencontrer toujours des êtres fragiles intérieurement. Auteur de 400 romans sous différents noms. Une quinzaine d’œuvres autobiographiques. Il existe 102 aventures de Maigret plus son autobiographie ! " Maigret n’essaie pas d’expliquer il cherche d’abord à comprendre. C’est un peseur d’âmes. Ce qui compte c’est un geste, un mot, un regard, un silence. Résoudre l’énigme pour lui c’est ressentir la crise psychologique qui a conduit au drame. "Distinguer Le charretier de la providence, dont l’action est située à l’écluse de Dizy, près d’Epernay (Maigret va dîner au restaurant La Bécasse). 


Exbrayat. Ensuite, viendront les Simonin (Touchez pas au Grizzbi), Giovanni, Boileau-Narcejac, Léo Malet, LeBreton, San Antonio, Louis C. Thomas .... Mais le roman noir américain sera déjà passé par là et rien ne sera plus comme avant.








Le roman noir   
Avec Chandler et Dashiell Hammett (I894-196I) à la différence du roman anglais qui situent leurs actions dans des milieux plus populaires avec des effets de réel encore plus grands (« des gens issus de la rue ») . Gallimard lance sa Série Noire en 1945 avec ces auteurs. Le Hard boiled abandonne la notion de jeu policier anglais pour un certain réalisme. Il a pour fond la violence et l’action, il ramène la vie au roman policier et connaîtra ensuite un renouvellement durable avec les auteurs de Black Mask et leurs successeurs. 


La série noire les a tous traduits mais pas toujours avec de bonnes traductions, et assez souvent en éditions abrégées, sans que les lecteurs soient prévenus. The Little sister de CHANDLER est devenu : fais pas ta rosière. Le roman noir va faire retrouver au policier les formes et les vertus de l’épopée. Il a une fonction sociale : réalise l’équilibre entre la pensée mythique et la pensée rationaliste, il arbitre chez l’homme « Les conflits de l’inconscient et du conscient ». 

https://www.facebook.com/thierry.brun.92?ref=br_rs










Le Détective intercède entre l’homme et l’impossible comme le prêtre le faisait entre l’homme et le sacré. Mais le décor est nouveau : c’est celui de la civilisation industrielle. Au roman du discours il oppose le roman du regard avec toutes les conséquences qui en découlent. Hammett ne sollicite pas l’intelligence du lecteur mais ses nerfs ou ses tripes ; il néglige la perception au profit de la sensation. Dans le même temps, certains écrivains américains continuent à faire du roman criminel classique : comme John Dickson CARR, Rufus KINC, Helen REILLY et Ellery QUEEN Ellery QUEEN, c’est le pseudonyme de Manfred B. LEE (1905- 1971) et de Frederic DANNAY (1905), deux cousins, fils d’immigrés polonais.


 

Le roman noir fait aussi école avec Peter CHEYNEY et son détective Lemmy Caution ; et James Hadley CHASE (René RAYMOND 1906-1984) Pas d’orchidées pour Miss Blandish...Le grand nom du roman noir, c’est Léo MALET et son détective Nestor Burma. Il a écrit les nouveaux mystères de Paris : I vol. par arrondissement (il en manque encore 5 ?) il invente en France le roman noir en même temps que les américains. On peut citer aussi SIMONIN (Touchez pas au grizzli), LE BRETON, GIOVANNI, SAN ANTONIO (disciple de Nestor Burma), Raf VALLET etc...


http://www.openculture.com/free_film_noir_movies



          -Vision des divers personnages : 


- Le criminel : appartient à tous les milieux dans le roman anglais. Dans le polar noir, aux bas-fonds. Tactique romanesque : central mais invisible : suspens. Fait-il peur, que représente-t-il :  le mal, l’intelligence, la marginalité, le dérèglement, la liberté , l’audace de la transgression larvée au creux de chaque lecteur, est-il un malade, une victime de la société déréglée ?
Fauteur de trouble dans la société, il cristallise toute la violence (bouc émissaire, victime propitiatoire ? )  


- La police, avec les journalistes : Dans l’économie du roman, ils sont les aides (comme dans les contes) qui mènent à la vérité. Le détective est celui qui accède au sens caché d’une réalité appréhendée pour le commun comme complexe, chaotique, sans sens. En cela, il est un « initiateur » qui décrypte, révèle, auquel on délègue cette compétence.
En quoi sont-ils les héros : intelligence, sang-froid, ténacité, courage, représentant de l’ordre, de la sécurité ?
Le processus d’identification : comment le lecteur se met-il aux côtés du policier ? par solidarité dans le jeu, repli vers la sécurité, choix de l’ordre face à la subversion 


-Vision de la mort 

Paradigme de la noirceur, de la peur
L’accumulation est-elle banalisation , plaisir, simple jeu intellectuel, un accident, une fatalité, une  tactique littéraire ?
La mort est-elle encore triste ?
Elle est dépourvue de tout sentimentalisme : les cadavres sont des objets, de la viande, plus ou moins observée, nécessaire à l’action.
La mort, en introduisant un bouleversement dans la situation initiale, déclenche le roman, fait vivre l’intrigue (paradoxe mort/vie, immobilisation/mouvement). Vision mécaniste de la mort, qui n’est qu’une pièce du jeu. 




-L’humour

Comment se manifeste-t-il : recul par rapport aux personnages, bizarrerie des situations.
Il est souvent au second degré : les personnages ne rient pas, c’est le regard de l’auteur sur certains milieux qui est porté avec humour voire cynisme (limite ? )



-Ambition de réalisme 

Indices textuels : lieux, descriptions minutieuses, gages de scientificité. Accentué par le passage à l’image (films, séries). Suscite l’observation attentive en quête de signes.
Conséquences chez les lecteurs dans leur vision de la police ? Le roman ignore la juridiarisation de la société : absence du procureur, des contraintes administratives, des échecs. 


-Vision de la société 

Roman à énigme : description de divers milieux, chronique sociale parfois drôle.
Polar : marges, bas-fonds, vision très noire, morbide de la société (quelle qu’elle soit). 


http://livre.fnac.com/a9354429/Thierry-Brun-Les-rapaces?NUMERICAL=Y#FORMAT=ePub#int=NonApplicable|9470477|NonApplicable|L1

L’analyse du mal

Qu’est-ce que le mal ? pas de théorie mais une description des disfonctionnements du cœur humain et des structures sociales : violence, haine, exprimés par l’argot.  
Le roman à énigmes anglo-saxon voit le mal dans la nature humaine mauvaise (criminels de milieux corrects).
Le roman noir violent démontre que c’est la mauvaise organisation sociale (monde déséquilibré, injuste) qui engendre le mal (criminel issus des marges et des paumés).
Quelle réparation face à la violence ? quelle place pour les victimes ? quelle image de la punition/rédemption. Le roman s’arrête où la justice commence


La suite ici : www.ecp-reims.fr/resources/Atelier+Passion+des+livres+2.doc

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